Monaco : Ravel sublimé par Nelson Goerner et l’OPMC sous la direction de Kazuki Yamada

Dans le cadre de sa saison 2024-2025 l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo a proposé en l’auditorium Rainier III dimanche 30 mars en présence de SAS La Princesse de Hanovre, un concert consacré exclusivement à quelques-unes des partitions les plus connues de Maurice Ravel dont on célèbre cette année ses 150 ans de sa naissance. (1875-1937). Concert en partenariat avec le festival du Printemps des arts de Monte-Carlo 2025.

Nelson Goerner, Kazuki Yamada et l’OPMC célèbrent les 150 ans de Ravel avec brio

Sous la baguette de son directeur musical Kazuki Yamada, cette soirée qui s’est déroulée à guichet fermé, s’est ouverte avec la célèbre « Pavane pour une infante défunte » originellement écrite pour le piano et orchestrée par Ravel. Une lecture conduite avec souplesse et clarté dans un tempo d’une lenteur assumée autant que nuancée.

Le pianiste Nelson Goerner abordait au cours de ce concert le concerto en sol majeur ainsi qu’en deuxième partie le concerto en ré majeur pour la main gauche, qui constituent une forme d’héritage musical du compositeur. Un véritable défi d’autant qu’était réalisé un enregistrement en live de la prestation qui fera l’objet d’une future édition discographique.

Maîtrisant avec bonheur les élans d’énergie incisive et la dynamique brillante aux couleurs jazzistiques de l’« allegramente » initial et du « presto » final de la première œuvre tout autant que la sensibilité lumineuse et la grâce poétique aux influences mozartiennes de l’adagio assai central dont un longue phrase du piano dessine la tendre expression, Nelson Goerner en a offert une interprétation magistrale bien soutenu par la direction attentive de Kazuki Yamada et l’engagement des musiciens de la phalange monégasque.

« Une barque sur l’océan »

La seconde partie du concert débutait à l’orchestre avec « Une barque sur l’océan » dont on a apprécié les effets puissants ou subtils de l’orchestration ravélienne évoluant dans une palette sonore imaginative, Kazuki Yamada colorant d’une gestique toujours élégante cette fresque musicale contrastée.

Nelson Goerner revenait au clavier pour donner le concerto pour la main gauche. Affichant un jeu pianistique d’une remarquable virtuosité, il a donné avec la complicité de Kazuki Yamada et des musiciens de l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo toute sa justesse de ton et une dimension remarquablement vivante à cette partition aux accents sombres et oppressants et à la force expressive d’une main gauche virevoltante s’emparant totalement de l’étendue sonore de l’instrument. Du grand art !

Le Boléro de Ravel

Le concert s’est achevé sur l’interprétation du non moins célèbre Boléro. On a beau avoir souvent entendu cette œuvre mythique, chaque nouvelle écoute révèle le génie de l’orchestration qui était celui de Maurice Ravel, ce côté à la fois répétitif mais toujours innovant de ces assemblages instrumentaux, de ces mariages de timbres qui naissent et se déploient au fil des mesures de cet ostinato.

Kazuki Yamada a l’intelligence de laisser libre cours à l’expression et au talent des remarquables musiciens et solistes de l’orchestre, se contentant d’imprimer l’architecture de ce mouvement envoûtant, de cette vague musicale dont il contrôle l’inexorable montée et les plans sonores successifs jusqu’à l’éclatement final, cette apothéose libre et passionnée qui respire la musique et dépasse toutes les limites, suscitant l’émotion et les applaudissements sans fin d’un public qui aura vécu ce dimanche, grâce à un pianiste d’exception, un chef et un orchestre talentueux et engagés de rares moments de bonheur.