- Auteur Danielle Dufour-Verna
- Temps de lecture 9 min
L’Orchestre de Cannes, Une Saison ‘fil rouge’ ornée d’un label prestigieux
Le prestigieux label « Orchestre national en Région » vient d’être attribué à l’Orchestre de Cannes Provence-Alpes-Côte d’Azur, le 6 janvier 2022, par le Ministère de la Culture. Fondé en 1975, l’Orchestre de Cannes offre aux publics des concerts ambitieux accompagnés d’artistes de renom ou de talents émergents. Rencontre avec son directeur général, Jean-Marie Blanchard.
Composé de 37 musiciens permanents — réunissant 10 nationalités — l’Orchestre de Cannes assure une centaine d’évènements par saison, en concerts symphoniques, musique de chambre et concerts éducatifs. Avec l’obtention de ce label, Orchestre national en Région, l’Orchestre national de Cannes rejoint certaines des formations les plus prestigieuses en France. Plusieurs thématiques pour chaque saison – des fils rouges- . Ce seront, pour ce début de saison 2022, dans une excellente programmation : le violon, la danse en musique, Saint-Saëns dont on fête l’anniversaire, la musique à l’image, la mer et la Mitteleuropa.
L'Orchestre de Cannes Provence-Alpes-Côte d’Azur devient Orchestre national en Région
Rencontre avec Jean-Marie Blanchard, directeur général de l'Orchestre National de Cannes
Danielle Dufour Verna/Projecteur TV – Vous êtes le directeur général de l’orchestre de Cannes qui a obtenu le 6 janvier dernier le label « Orchestre National en Région ». Qu’est-ce-que cela change pour l’orchestre ?
Jean-Marie Blanchard – Ce label a deux vertus. La première est évidemment un signe de reconnaissance de la qualité de l’orchestre et surtout de sa nécessité en termes de maillage territorial, en termes de diffusion auprès des publics. Et cela nous donne essentiellement une convention d’objectifs, l’assurance d’un financement pérenne sur une période de 3 à 5 ans qui permet de travailler d’une manière plus sereine dans un cadre pluriannuel.
DDV – Cette distinction du Ministère de la Culture est un véritable souffle en pleine pandémie COVID ...
Jean-Marie Blanchard – Oui, c’est vraiment un gros atout avec plus de visibilité au-delà des frontières régionales. On est très heureux.
Une programmation réalisée en très bonnes intelligence, collaboration, amitié avec Benjamin Levy, directeur musical
DDV – Une très belle programmation pour cette saison. Vous participez à son élaboration ?
Jean-Marie Blanchard – C’est une programmation qui se monte en très bonnes intelligence, collaboration, amitié avec principalement Benjamin Levy à qui je fais des suggestions parfois et qu’il est tout-à-fait libre d’accepter ou de refuser, mais c’est Benjamin Levy qui est notre Directeur musical.
DDV – Certaines œuvres sont-elles privilégiées parce que vous les aimez ?
Jean-Marie Blanchard –Nous pensons au public auquel nous nous adressons, c’est l’essentiel. Je pense qu’un bon programme, un programme équilibré, est un programme avec une œuvre que le public connait, retrouve, et, autour de cette œuvre, faire découvrir des œuvres du passé, d’aujourd’hui ou du patrimoine du 20e siècle. C’est toujours ce qui nous oriente. Nous avons décidé, depuis l’année dernière, de créer des cycles à travers notre programmation, des fils rouges, quatre, cinq, six thématiques qui se croisent, se retrouvent. Cela permet de raconter une histoire tout au long de la saison.
DDV – Des exemples ?
Jean-Marie Blanchard – Pour la saison actuelle, nous avons un fil rouge autour du violon, un fil rouge autour de la danse en musique, un fil rouge autour de Camille Saint-Saëns dont on fête l’anniversaire, un fil rouge de la musique à l’image que l’on retrouvera chaque année parce que c’est véritablement une des singularités que nous souhaitons développer. Et puis, un fil rouge autour de la mer avec un certain nombre de nos programmes qui permettent de mettre en valeur des œuvres maritimes, si je puis dire. Et, enfin, un fil rouge autour de Mitteleuropa. On retrouvera ces thématiques tout au long de la saison et à travers toutes les formes de concerts, les concerts classiques, les concerts d’une heure, les concerts de musique moderne et contemporaine, et il en sera de même l’année prochaine. Il est un peu tôt pour les dévoiler mais la saison se construira là aussi autour de thématiques. Nous avons un orchestre de formation Mannhein, de formation Mozart. Ce n’est pas un orchestre philharmonique, c’est un orchestre symphonique avec 37 musiciens permanents et nous avons toujours le souhait d’adapter les œuvres à notre format, c’est très important.
Des ciné-concerts, la musique à l'image
DDV – Pouvez-vous développer la musique à l’image ?
Jean-Marie Blanchard – Au fond, ce qui vient à l’esprit immédiatement, c’est une chose assez nouvelle qui a beaucoup de succès auprès du public, c’est ce qu’on appelle le ciné-concert. Le ciné-concert, c’est soit la réplique, soit l’imitation de la manière dont au début du cinéma, on accompagnait le film muet de musique qui pouvait être jouée par un pianiste, par un petit ensemble, voire par un grand orchestre. Le premier de l’histoire du cinéma, c’est ‘L’assassinat du Duc de Guise’ avec une musique de Saint-Saëns qui accompagnait le film, écrite pour grand orchestre. Finalement, depuis ses origines, le cinéma a toujours eu un lien avec la musique, un lien compliqué, une histoire qui n’était pas vraiment une histoire d’amour. Les compositeurs qui ont écrit, pour le cinéma, ou leurs œuvres, ont été reconnus très tardivement. Nous avons à cœur, à Cannes, de développer ces ciné-concerts, à la fois en projetant les ciné-concerts, en passant des commandes à des compositeurs d’aujourd’hui sur des films de l’époque du muet qui n’ont pas de partition pour les accompagner. Ce projet s’articule autour des premiers films du cinéma, ceux des frères Lumière, des films très courts bien sûr. Nous avons toute une politique de commandes que nous allons développer sur plusieurs années. On peut également créer des œuvres originales qui permettent d’allier l’image et la musique. Cela fait écho à un désir des compositeurs et des plasticiens d’aujourd’hui qui ont envie de cette rencontre.
DDV – Peinture, sculpture et musique
Jean-Marie Blanchard – C’est tout-à-fait cela, un peintre ou un plasticien qui vont travailler ensemble à une œuvre originale. Pour que ce soit pérenne, la vidéo sera certainement un support privilégié. Deux choses importantes encore, la ville de Cannes a vraiment le souhait de développer des formations de l’image et la première pierre de ce développement, c’est le Campus Méliès à Cannes, une antenne de l’Université de Nice. Dans ce campus dédié aux écritures créatives, il y a une section dédié à la musique pour les films vidéo etc. Nous nous associons donc avec le campus et nous offrons aux étudiants la possibilité d’écouter leur travail, leurs œuvres, en leur donnant des services d’orchestre. Ils pourront entendre, avec un orchestre professionnel, ce que donnent leurs compositions. Nous sommes très heureux de ce partenariat. Le campus se trouve à 5 minutes de notre lieu. Tout ce quartier de Cannes est en train de se développer. Il y aura bientôt un grand complexe avec une structure académique, des studios, des résidences et sociétés. Nous sommes vraiment en connexion avec les efforts que la ville de Cannes déploie.
DDV –Très tournés vers les jeunes
Jean-Marie Blanchard –Tournés vers les jeunes, tournés vers la formation autour des métiers de l’image et de la musique. Une deuxième chose, l’année prochaine, nous aurons en résidence un artiste compositeur qui s’intéresse à la question de la musique à l’image et qui écrira pour notre orchestre, participera à la définition de la programmation et sera, lui aussi, en connexion avec les étudiants du Campus.
DDV – L’œuvre cinématographique obtient un succès, souvent, grâce à l’œuvre musicale
Jean-Marie Blanchard –Mais bien sûr ! C’est essentiel. Je compare cela à ceux qui font de la lumière au théâtre, au cinéma. Un éclairagiste c’est comme un monteur, comme un musicien, ils peuvent changer l’histoire. La même mise en scène peut raconter une toute autre histoire.
DDV – Un de vos fils rouges, la mer. Naturellement, Cannes et la mer, mais la mer dans quel sens, une mer qui rassemble les pays autour de la Méditerranée ?
Jean-Marie Blanchard – C’est un thème que l’on pourrait développer tellement. Pour nous, cela a été l’idée de donner à entendre des œuvres qui évoquent le maritime comme ‘La mer’ de Debussy au premier chef évidemment et, d’ailleurs, avec une petite surprise assez amusante, assez originale, autour de ce concert. Concert dans lequel il y aura également le poème de Chausson, le Poème de l’amour et de la mer. C’est vraiment un programme maritime. On donne aussi une œuvre de Vivaldi qui a été composée pour les fêtes marines de Venise. Nous avons également un très joli programme de musique de chambre qui a été composé par nos musiciens autour du maritime, inspirés par l’eau.
DDV – 37 musiciens dans l’orchestre de Cannes ?
Jean-Marie Blanchard -37 musiciens permanents, dix nationalités et une moyenne d’âge de 46 ans, assez basse.
DDV – Des problèmes inhérent à la COVID ?
Jean-Marie Blanchard – Lors de la première vague, aucun problème. Nous avons beaucoup répété sans public. Nous avons fait des enregistrements qui sortiront l’année prochaine, pas un problème. Depuis la vague actuelle, on a eu des difficultés et nous avons dû annuler et reporter des concerts.
DDV –Une dernière question, quelle est votre conception du bonheur ?
Jean-Marie Blanchard – Pour moi, le bonheur, c’est l’amour et la beauté qui nous accompagnent quotidiennement, les êtres et les arts.