- Auteur Jacques Jarmasson
- Temps de lecture 5 min
Héroïque ! Le concert de fin de saison de l’Orchestre national Avignon-Provence
Entre la symphonie N° 3 dite «Héroïque» de Ludwig van Beethoven et la création mondiale du concerto pour violoncelle et orchestre de Michaël Levinas, oui, le dernier concert symphonique interprété par les musiciens de l’Orchestre National Avignon-Provence sous la direction musicale de la première femme chef d’orchestre permanent Débora Waldman, fut complètement héroïque !
Vendredi 3 juin 2022 à 20h30 à Opéra Grand Avignon, pour clôturer sa saison symphonique 2021 / 2022, c’est un concert tout à fait héroïque qui fut proposé par l’ONAP (Orchestre National Avignon-Provence), et pour cause, puisqu’en deuxième partie de soirée, c’est la symphonie N° 3 dite «Héroïque» de Ludwig van Beethoven, qui fut interprétée par la formation de la cité papale, sous la direction musicale de sa cheffe titulaire Débora Waldman.
Héroïque aussi de par une programmation de la création mondiale du concerto pour violoncelle et orchestre de Michaël Levinas, joué par le talentueux violoncelliste Henri Demarquette.
En début de soirée, c’est une œuvre des plus conventionnelle de Wolfgang Amadeus Mozart, l’Ouverture de La Clemenza de Titus (dernier opera seria achevé par Mozart quelques semaines avant sa mort) que le public accueillit avec un plaisir non dissimulé.
Héroïque, le dernier concert symphonique de la saison 2021-2022 de l'Orchestre national Avignon - Provence !
Michaël Levinas a imaginé un langage mélodique et expressif du violoncelle
Pour présenter son œuvre, Michaël Levinas s’adressa directement au public, pour donner des explications très détaillées sur son écriture. Cette création est une co-commande de l’Orchestre national Avignon-Provence, l’Orchestre national de Cannes et l’Orchestre National de Bretagne. Elle est la première œuvre issue du Consortium créatif, un collectif de cinq orchestres français qui a pour objectif de promouvoir et de diffuser la création contemporaine a-t-il précisé. En effet, après sa création en Avignon, deux autres concerts sont prévus avec le même soliste, le jeudi 27 octobre 2022 à Opéra de Rennes avec l’Orchestre National de Bretagne et samedi 3 décembre au Théâtre Debussy (Palais des Festivals et des Congrès de Cannes) avec l’Orchestre National de Cannes.
La création mondiale du concerto pour violoncelle et orchestre de Michaël Levinas
« La relation polyphonie-harmonie qui traverse l’ensemble du Concerto est basée sur des canons entre les instruments procédant par évolutions faisant évoluer polyphoniquement et alternativement les intervalles des accords et des harmonies en doubles-cordes de la mélodie du soliste. Cela a été pour moi l’enjeu du travail que j’ai consacré à la composition du Concerto pour violoncelle. À la suite de ma rencontre avec le violoncelliste Henri Demarquette (avec lequel j’ai donné en concert l’intégrale des Sonates de Beethoven), j’ai imaginé un langage mélodique et expressif de l’instrument soliste… L’écriture mélodique, souvent en double-corde du violoncelle solo (issu des mouvements des grilles harmoniques de l’orchestre) est-elle même polyphonique. Il s’agissait pour moi de trouver pour le violoncelle solo ce qui constitue son langage et son répertoire : une vocalité et des affects qui sculptent la mélodie et ses ponctuations. Ce sont ces affects qui inspirent les titres des quatre mouvements de ce Concerto » avait déclaré le compositeur en mars dernier.
Le violoncelliste Henri Demarquette a su s’immerger dans l’œuvre de Levinas
Le talent du soliste, sa technique sans faille et sa façon de faire vibrer ce merveilleux instrument qu’est le violoncelle, ont certainement contribué à faire apprécier cette œuvre, qui aurait pu être perçue comme difficilement compréhensible par un public non averti. D’autant qu’Henri Demarquette a la faculté de passer allègrement d’une création contemporaine à l’interprétation des suites de Bach qu’il a donné dès le lendemain à Villeneuve-lez-Avignon.
« Il est vrai qu’on fait le grand écart entre la création d’une œuvre nouvelle avec la découverte de cette œuvre et le plus classique du répertoire du violoncelle, ces suites de Bach considérées comme la Bible de notre instrument, que l’on travaille depuis notre enfance et qu’on continue de découvrir encore aujourd’hui » déclare Henri Demarquette.
Virtuose et enseignant
Virtuose mais aussi enseignant, le violoncelliste reste attaché à la transmission : « Enseigner nous apprend énormément, c’est toujours une occasion de se remettre en question. J’ai une très belle classe à l’Ecole Normale de Musique de Paris, et j’adore cette notion de transmission, aussi c’est avec plaisir que j'accepte des rencontres avec les élèves et étudiants d’autres établissements ».
Le concert se conclut par ce monument du répertoire symphonique qu’est l’Eroica de Beethoven, dont l’ampleur et la hauteur d’inspiration galvanisent l’orchestre. Le compositeur l’avait dédiée à l’origine à Bonaparte, mais il biffa sa dédicace après avoir appris que le Premier Consul s’était fait couronner empereur. La symphonie fut dès lors dédiée à la mémoire d’«un grand homme ». Une fois de plus, sous la baguette de Debora Waldman, les musiciens de l’orchestre national Avignon-Provence donnèrent le meilleur d’eux-mêmes, pour clôturer cette saison par un véritable feu d’artifice.