- Auteur Jacques Jarmasson
- Temps de lecture 8 min
Un concert “Au Crépuscule” avec David Kadouch et l’Orchestre national Avignon Provence
Pour son deuxième concert symphonique de la saison 2023-2024, l’Orchestre national Avignon Provence a présenté un programme d’exception avec un invité soliste d’exception . Le pianiste David Kadouch a interprété avec grande émotion le concerto pour piano de la compositrice lettone Lūcija Garūta, jamais joué en France ni à l’étranger, puis a laissé sa place aux musiciens de l’orchestre renforcé par les étudiants de l’Institut Supérieur d’Enseignement de la Musique d’Aix-en-Provence pour la Sixième Symphonie de Tchaïkovski.
Avec sa soirée « Au crépuscule » du vendredi 27 octobre 2023, l’Orchestre national Avignon-Provence a mis en lumière le concerto pour piano et orchestre de la compositrice lettone Lūcija Garūta, avec comme soliste David Kadouch et la 6ème symphonie de Tchaïkovski. Deux œuvres plus que rarement jouées, le concerto n’ayant jamais été donné en France ou hors de Lettonie, et la 6ème symphonie, réclamant un effectif d’orchestre bien plus important que les 38 musiciens permanents de la formation Avignonnaise.
Concert Symphonique de l'Orchestre national Avignon Provence, "Au Crépuscule"
Un effectif orchestre renforcé avec les étudiants de l’Institut Supérieur d’Enseignement de la Musique d’Aix-en-Provence
Pour cette soirée, les 38 permanents de l’ONAP ont donc vu leur effectif renforcé par des musiciens supplémentaires et 16 étudiants de l’Institut Supérieur d’Enseignement de la Musique (IESM) d’Aix-en-Provence. Ces étudiants musiciens de l’IESM avaient suivi tout un parcours durant le mois d’octobre afin d’intégrer l’Orchestre pour ce concert, grâce, pour cette saison encore, à l’ONAP qui propose aux étudiants de l’Institut d’Enseignement Supérieur de la Musique d’intégrer son orchestre pour interpréter à leurs côtés un programme symphonique. Une rencontre immersive et professionnelle qui a pour objectif d’amener les étudiants dans la pratique professionnelle d’un orchestre, en préfiguration de leurs futures activités d’artistes et d’enseignants. Le stage était placé sous la responsabilité pédagogique et artistique de la cheffe Débora Waldman et des solistes de chaque pupitre.
« Au Crépuscule », un programme exceptionnel et inédit
Une première en France et hors de Lettonie : Le pianiste David Kadouch, «Révélation Jeune Talent» des Victoires de la musique 2010, a permis aux mélomanes de découvrir le concerto pour piano de Lūcija Garūta, œuvre virtuose s’il en est de la compositrice contemporaine de Chostakovitch. Son concerto est un voyage initiatique couronné par une cadence passionnée, que David Kadouch a interprété avec le talent qu’on lui connaît ! Le public a ovationné ce merveilleux artiste qui s’est dit heureux et ému d’avoir joué le concerto de Lūcija Garūta en Avignon.
David Kadouch
Né en 1985, David Kadouch se forme auprès de Odile Poisson au C.N.R. de Nice, de Jacques Rouvier au CNSM de Paris, de Dmitri Bashkirov à l’Ecole Reina Sofia de Madrid et se perfectionne auprès de Murray Perahia, Maurizio Pollini, Maria-Joao Pires, Daniel Barenboim, Vitaly Margulis, Itzhak Perlman, Elisso Virsaladze et Emanuel Krasovsly. A 13 ans, il joue au Metropolitan Hall de New York, à 14 ans au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou,» en 2005, il est l’invité des Académies de Salzburg et de Verbier (Prix d’Honneur en 2009), puis finaliste du «Leeds International Piano Competition » en 2009. Depuis 2007, il est lauréat de l’ADAMI, de la Fondation Natexis Banques Populaires et également « Révélation Jeune Talent » des Victoires de la Musique 2010 puis « Young Artist of the Year » aux Classical Music Awards 2011.
David Kadouch est invité dans de nombreux festivals tels que le Festival de musique contemporaine de Lucerne sous la direction de Pierre Boulez, le Klavier-Festival Ruhr, les festivals de Gstaad, Montreux, Verbier, Jérusalem, Aix-en-Provence, Colmar, Menton, Deauville, la Roque d’Anthéron, Montpellier, Saint-Denis, Piano aux Jacobins à Toulouse, Folle Journée de Nantes, et en Chine. Il se produit régulièrement en musique de chambre avec ses partenaires Edgar Moreau, Renaud et Gautier Capuçon, Nikolaj Szeps-Znaider, Antoine Tamestit, Frans Helmerson, Victor Julien-Laferrière, Geneviève Laurenceau, Guillaume Bellom, Yuri Revich, Sol Gabetta, Patricia Kopatchinskaja, Michel Dalberto, ainsi que les Quatuors Ebène, Modigliani, Quiroga et Ardeo.
Il est également l'invité soliste de nombreux orchestres tels que l’Orchestre de la Tonhalle de Zurich, le BBC Symphony Orchestra, Orchestre Philharmonique de Radio France, Orchestre National de France, Orchestre National de Lille, Orchestre de la Fondation Gulbenkian, Orchestre de Strasbourg, Halle Orchestra, Israel Philharmonic, Hong-Kong Sinfonietta, Orchestre Insula, Orchestre National de Montpellier, Orchestre Philharmonique de Marseille, Sinfonia Varsovia, BBC Scottish Symphony Orchestra, Orchestre Symphonique de Munich, Vancouver Symphony Orchestra, Symphoniker Hamburg, Orchestre Philharmonique Royal de Liège, Orchestre National de Belgique, etc.
Il collabore régulièrement avec des chefs tels que David Zinman, Marc Minkowski, Myung-Whun Chung, Daniele Gatti, Jean-Claude Casadesus, Laurence Equilbey, Matthias Pintscher, Aziz Shokhakimov, Robin Ticciati, Marc Albrecht.
David Kadouch donne de nombreux récitals en solo en Europe et ailleurs, dont Evanston, Biel, Bruxelles, Paris, Toulon, Amsterdam, Eijsden, Miami, et en duo avec Edgar Moreau à Vienne, Londres, Amsterdam, Toulouse, Lyon, Nantes, Heilbronn, Clermont-Ferrand, Milan, Heiderlberg, Aix-en-provence, Montpellier, Turin…
Lūcija Garūta et son concerto pour piano
Lūcija Garūta est née à Riga (capitale de la Lettonie) en 1902. De 1919 à 1925 elle étudie à l'Académie de musique de Lettonie avec comme professeur Jāzeps Vītols pour le piano et d'autres professeurs comme Jānis Mediņš, Jēkabs Mediņš ou Jēkabs Kārkliņš.
Après avoir obtenu son diplôme, elle travaille à la Riga Radio de 1925 à 1926. En 1926 elle enseigne le piano et la théorie musicale à l'école de musique de Jāzepa Mediņa. Cette année là, elle étudie avec Alfred Cortot, Isidor Philipp et Paul Le Flem, et en 1928 elle étudie la composition avec Paul Dukas à l'École normale de musique de Paris. En 1926 elle fait ses débuts à Paris et ensuite devient une compositrice active. Elle est élue professeur en 1960 à l'Académie de musique de Lettonie et commence à enseigner la composition et la théorie musicale en 1940. La maladie met fin à sa carrière d'interprète mais elle continue à enseigner. Lūcija Garūta meurt en 1977, elle est enterrée au cimetière de la Forêt à Rīga.
La Sixième Symphonie de Tchaïkovski, une grande intensité émotionnelle
En seconde partie, l’Onap, sous la baguette de Debora Waldman, a interprété la Sixième Symphonie de Tchaïkovski, si rarement jouée à Avignon car son interprétation nécessite un effectif d’une soixantaine de musiciens et musiciennes.
Ultime confession d’un compositeur en proie depuis toujours au malaise existentiel et qui disparaît quelques jours après sa création, cette Symphonie dite « Pathétique » de Tchaïkovski se compose de quatre épisodes douloureux, conclus dans l’accablement et le néant. Un drame qui a plongé le public Avignonnais dans une réelle et intense émotion.
La Symphonie no 6 en si mineur op. 74, sous-titrée « Pathétique » de Piotr Ilitch Tchaïkovski, fut composée entre février et août 1893.
Contexte historique « Je pense qu'il me sera donné d'écrire une symphonie exemplaire : probablement je me battrai jusqu'au dernier souffle pour atteindre la perfection sans jamais y réussir. ». C'est ce qu'écrit en 1891 Tchaïkovski voulant, sans regarder le prix à payer immédiatement, réaliser cette idée exprimée dans une autre lettre. « Il me vint à l'idée une autre symphonie, cette fois avec un programme restant inconnu de tous, à moins que quelqu'un ne puisse le deviner: l'œuvre sera appelée une symphonie à programme. Il y aura beaucoup de nouveautés dans cette symphonie en termes de forme. ». Tout cela est dit dans une lettre à son neveu, puisque les relations avec Nadejda von Meck avaient été rompues. Ainsi, Tchaïkovski a commencé à travailler à la composition d'une nouvelle symphonie. « Plus je travaille à l'orchestration, plus je la trouve difficile. Il y a vingt ans, j'aurais terminé plus tôt, sans y penser si fortement, et je m'en serais bien sorti. Maintenant, je suis devenu un vieil homme, sans foi en lui-même. Pendant deux jours entiers j'ai fait cuire à feu doux deux pages. Je n'avance pas comme je voudrais, mais je n'abandonne pas».
Tchaïkovski a commencé les esquisses en 1893 et son orchestration a été achevée en août. Avec quelques doutes quant au final, Tchaïkovski a décidé de faire en privé une lecture pour une exécution "portes fermées" en1893 par un orchestre composé d'étudiants du Conservatoire sous la direction de Vassili Safonov (1852-1918), pianiste, chef d'orchestre, professeur et directeur du Conservatoire de Moscou.
Le 28 octobre 1893, Tchaïkovski en personne a dirigé la première dans la salle de réunion des seigneurs de Saint-Pétersbourg. L'accueil a été chaleureux soit en raison de la direction du compositeur soit en raison du « finale » particulièrement adapté pour déclencher les applaudissements de l'auditoire.
Deux jours plus tard, il a envoyé la partition à son éditeur pour la publication, en lui demandant de mettre en première page la dédicace à son neveu Vladimir Davydov. La symphonie a été publiée en 1894 avec le titre de Pathétique.
La symphonie a été jouée une seconde fois, après la mort du compositeur, qui est survenue le 6 novembre 1893, lors d'une soirée qui en fait a revêtu le caractère d'un hommage. Elle a alors obtenu un franc succès. Elle se compose de quatre mouvements : Adagio-Allegro non troppo, Allegro con grazia, Allegro molto vivace et Finale - Adagio lamentoso.