- Auteur Danielle Dufour-Verna
- Temps de lecture 8 min
Olympe de Gouges, Une femme moderne au Panthéon de l’égalité
« La femme qui a le droit de monter à l’échafaud doit aussi avoir le droit de monter à la tribune » (Art. X). » (dédicace d’Olympe de Gouges à Marie -Antoinette). Quand une femme donne sa vie pour l’émancipation, l’égalité, la liberté, quand son nom s’inscrit au fronton des lycées, des places etc, elle est un exemple pour les jeunes générations et fait partie à part entière de notre patrimoine culturel immatériel.

Portrait d’Olympe de Gouges attribué à Alexandre Kucharski. Pastel sur parchemin, vers 1788 © Wikimedia commons
Portrait d'une femme de lettres qui a marqué le mouvement littéraire du 18 ème siècle. Voici une biographie courte d'Olympe de Gouges (1748 - 1793), pionnière féministe, qui s'est battue pour l'égalité, contre l'esclavage et pour les droits des femmes. Malgré son idéologie révolutionnaire - ou peut-être à cause d'elle - Olympe de Gouges a été guillotinée à la suite de la purge qui a suivi la Révolution Française, le 3 novembre 1793 à Paris. Son fils l'a publiquement désavouée, et la France et le monde entier l'ont enterrée pendant trop longtemps. Ce n'est qu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale que la figure d'Olympe de Gouges a été retrouvée comme l'une des grandes figures humanistes de la France de la fin du XVIIIe siècle. Objet d'études aux États-Unis, en Allemagne et au Japon, en France, après la publication de sa biographie, elle a été honorée lors des célébrations du bicentenaire de la Révolution française en 1989. Depuis, plusieurs de ses pièces ont été jouées, ses écrits sont réédités et plusieurs communes françaises ont donné son nom à des écoles, des lycées, des places et des rues. Une reconnaissance tardive mais essentielle d'une grande combattante pour les femmes et pour l’égalité.
Quelle est la place des femmes au 18ème siècle ?
Les femmes et la Révolution Française
Femme faible de par sa constitution, femme tentatrice, femme fatale ...
Femme faible de par sa constitution, femme tentatrice, femme fatale, les femmes, depuis des temps très anciens, sont cause de nombreux malheurs. A la veille de la Révolution française, les mentalités n'ont pas beaucoup changé...
En 1789, lors des débats sur les conditions de formation des assemblées primaires, la question du droit de vote des femmes ne fut même pas soulevée à l'Assemblée Constituante. Elles étaient naturellement évincées des droits civiques, sous le poids des préjugés sur la nature des femmes et de la perception de la frontière entre espace privé et public, l'ordre des rapports naturels et sociaux.

Olympe de Gouges, pionnière du féminisme français
Née à Montauban
Considérée comme l’une des premières féministes, Olympe de Gouges, de son vrai nom Marie Gouze, est née à Montauban, dans une famille modeste, le 7 mai 1748. Forcée à se marier à l’âge de 17 ans, elle devient veuve moins d’un an après et décide, avec son nouveau-né, de quitter sa ville natale pour vivre à Paris. Elle refuse de porter le nom de son mari et, pour faire accepter ses idées, se donne le pseudonyme d'Olympe de Gouges, créé à partir du nom de sa mère et de son patronyme.
Elle devient alors une femme écrivain et publie, à partir de 1780, des romans et des pièces de théâtre destinés à défendre ses idées novatrices.

La révolution française
À Paris, elle rencontre des philosophes, des écrivains et des journalistes et commence à écrire des comédies et des pièces de théâtre aux thèmes anti-esclavagistes et libéraux. Ses écrits transpirent les idées des Lumières. Influencée par Rousseau et autodidacte, elle se consacre à une vie considérée comme libertine, refusant d'être la propriété de tout membre du genre masculin, mais sans devoir renoncer à ses plaisirs Lorsque la révolution éclate, Olympe se laisse emporter par l'illusion d'une lutte pour les droits de tous. Elle rêvait également d'une constitution qui garantirait les droits fondamentaux des marginaux, des pauvres, des enfants naturels et des Noirs.
Olympe de Gouges, son combat pour l'égalité des droits des femmes
L’abolition de l’esclavage, le divorce, contre la peine de mort, pour la non-violence, pour le vote des femmes, etc.
Zamore et Mirza ou "L'esclavage des noirs"
Sa pièce "L'esclavage des noirs" connait un grand succès et est inscrite au répertoire de la Comédie-Française en 1785 sous le titre Zamore et Mirza, ou l'heureux naufrage. Dans cette pièce, elle traite de la condition des esclaves, ce qui lui vaut d'être emprisonnée à la Bastille, mais d'être libérée peu après grâce à ses amis. Pendant la Révolution française, sa pièce est jouée à la Comédie Française, et elle devient l'un des principaux défenseurs de l'abolition de l'esclavage aux côtés de l'abbé Grégoire et du député girondin Brissot. Elle a également écrit des pamphlets politiques sur la fiscalité, les réformes sociales dans lesquels elle demandait l'égalité des droits pour tous les citoyens sans distinction de sexe, de couleur de peau ou de statut social. Elle défend également la non-violence, les orphelins et les droits des femmes célibataires.
Qui est Olympe de Gouges ? une femme de lettres, femme moderne
La Révolution française a donné à Olympe de Gouges l'occasion de montrer à quel point elle était moderne par rapport à son époque. Elle réagit contre l'Assemblée constituante qui exclut les femmes des droits électoraux, et publie un texte, une déclaration qui appelle à l'émancipation des femmes, pour la reconnaissance au divorce et à l'égalité totale et inconditionnelle entre les sexes, posant de fait les bases du féminisme.
Olympe n'hésite pas non plus à dénoncer le régime de terreur et les excès sanglants du gouvernement révolutionnaire. Sans hésiter, elle s'en prend d'abord à Marat, puis à Robespierre. C'était un geste imprudent, qui a entrainé sa condamnation à mort. Même prisonnière, elle a continué à condamner l'injustice et à plaider sa cause.
Pourquoi Olympe de Gouges a été guillotinée ...
Après la défaite des Girondins, elle est accusée d'être l'auteur d'une de leurs affiches.

Arrêtée le 20 juillet 1793, en prison, elle exige d'être jugée afin de se défendre contre les accusations et d'éviter le Tribunal révolutionnaire. Le 2 novembre 1793, après l'exécution des amis Girondins, elle est traduite devant le Tribunal révolutionnaire sans l'assistance d'un avocat. Elle se défend dans un procès sommaire qui la condamne à mort pour avoir défendu un État fédéré, conformément aux principes girondins.
Marie-Olympe de Gouges a été guillotinée le 3 novembre 1793, à l’âge de 45 ans, sur la place de la Concorde à Paris. Son fils, Pierre Aubry, l'a désavouée publiquement peu après son exécution par crainte d'être arrêté.
Elle avait la témérité de ‘’vouloir être un homme d’état et d’avoir oublié les vertus propres à son sexe.’’
Quels droits pour les femmes revendique Olympe de Gouges dans sa Déclaration des droits de la femme ? (1791)
« Homme, es-tu capable d'être juste ? C'est une femme qui t'en fait la question ; tu ne lui ôteras pas moins ce droit. Dis-moi ? Qui t'a donné le souverain empire d'opprimer mon sexe ? Ta force ? Tes talents ? Observe le créateur dans sa sagesse ; parcours la nature dans sa grandeur, dont tu sembles vouloir te rapprocher, et donne-moi, si tu l'oses, l'exemple de cet empire tyrannique. Remonte aux animaux, consulte les éléments, étudie les végétaux, jette enfin un coup d'œil sur toutes les modifications de la matière organisée ; et rends-toi à l'évidence quand je t'en offre les moyens. Cherche, fouille et distingue, si tu le peux, les sexes dans l'administration de la nature. Partout, tu les trouveras confondus, partout ils coopèrent avec un ensemble harmonieux à ce chef-d'œuvre immortel. L'homme seul s'est fagoté un principe de cette exception. Bizarre, aveugle, boursouflé de sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l'ignorance la plus crasse, il veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ; il prétend jouir de la Révolution, et réclamer ses droits à l'égalité, pour ne rien dire de plus. »
"La femme naît libre et vit égale à l'homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune".
Sur les 17 articles de la déclaration des droits des femmes, seul celui sur le divorce a été pris en compte.