Pierre Boulle, auteur de La Planète des singes : un écrivain illustre et méconnu à la fois

Écrivain, Pierre Boulle, auteur de La Planète des Singes, est né à Avignon le 20 février 1912 et décédé le 31 janvier 1994, est inhumé au cimetière Saint-Véran de la préfecture du Vaucluse. Son œuvre, avec Le pont de la rivière Kwai, est connue dans le monde entier mais l'auteur reste largement méconnu. Jean Loriot, son exécuteur testamentaire, nous éclaire sur cette personnalité romanesque disparue il y a trente-et-un ans. Petite anecdote : à Avignon, un boulevard porte son nom : le boulevard Pierre Boulle.

Pierre Boulle, auteur de La planète des singes et Le pont de la rivière Kwaï

Quel est votre lien avec Pierre Boulle ?

Jean Loriot : Je suis le gendre de Pierre Boulle. J'ai épousé sa fille adoptive Caroline. Elle est décédée en janvier 2011. Hélas, nous n'avons pas eu d'enfants . Mais j'ai en ai deux issus d'un premier lit qui sont mes héritiers.

Pouvez-vous vous présenter ?

Jean Loriot : Je m'appelle Jean Loriot et je suis âgé de presque 85 ans. J'ai été chef de clinique, assistant des hôpitaux, agrégé en médecine, et j'ai exercé à Montpellier.

Ingénieur et résistant

Résistant, écrivain ..., proche de la nature avec L'Ilon,  un récit de ses aventures dans un cabanon familial sur le Rhône, Pierre Boulle présente bien des traits communs avec Romain Gary, Compagnon de la Libération, qui célébrait  lui aussi la nature en 1956 avec Les Racines du ciel .

Jean Loriot : Ce sont des mondes voisins mais il n'y a aucune relation entre eux.

Mais ils étaient tous les deux combattants et écrivains.

Jean Loriot : Oui, d'ailleurs, Pierre Boulle a été l'un des premiers résistants en Asie. Il a tenté vainement de rentrer dans son pays pour le défendre mais le gouvernement de Pétain l'avait interdit. Il avait été contacté par le général de Gaulle alors qu'il se trouvait en Malaisie. Il s'était fait remarquer et le général a demandé au général de Langlade de rencontrer ce personnage curieux qui voulait défendre son pays. Pierre Boulle n'a pas exploité son passé de résistant. Il a obtenu la Légion d'honneur à la fin de la guerre car il avait fait preuve d'un courage exceptionnel. Mais dans l'ordre de la Légion d'honneur, il a progressé très lentement si bien que c'est Jack Lang bien plus tard qui a permis qu'il soit élevé au grade d'officier de la Légion d'honneur.

Quel homme était Pierre Boulle ?

Jean Loriot : Je l'ai très bien connu. J'ai vécu avec lui pendant plus d'une vingtaine d'années. Ma femme était sa  fille adoptive et sa nièce .

Mais quel homme était-il ? Il était joyeux, songeur ?

Jean Loriot : Il était extrêmement réservé. Il parlait peu et réfléchissait beaucoup. Il fuyait tout ce qui était artificiel. Avant tout, c'était un ingénieur très brillant en mathématiques qui avait intégré Centrale-Supelec en passant le concours des grandes écoles. Beaucoup de villes françaises ont décidé d'éclairer les villes avec l'électricité. Il a  été chargé d'électrifier de grandes villes françaises comme Valenciennes, Riom, Clermont-Ferrand, Lyon. Mais en fait, il s'ennuyait. A l' école Centrale, il a demandé d'occuper d'autres fonctions. Il y avait de grosses demandes sur le caoutchouc en Indochine. Il a accepté de partir en Malaisie pour diriger une plantation d'hévéa. Il y était très heureux. Il adorait la nature et la solitude.

Pierre Boulle a écrit combien de romans ?

Jean Loriot : Nous avons édité avec ma femme 42 romans et nouvelles dont deux  inédits après sa mort.

Il est célébré à Hollywood avec la saga de La Planète des singes mais reste largement ignoré dans son pays.

C'est un problème que j'ai en partie résolu grâce à un de vos confrères du Monde qui lui a consacré un grand article. Il vivait d'une façon monacale. Votre confrère m'avait demandé de le résumer en deux mots. J'ai réfléchi pendant un certain temps. Deux mots me sont venus à l'esprit. C'était: moine écrivain. 

Les droits d'auteur

Percevez-vous des droits sur son œuvre ?

Jean Loriot : Depuis que Caroline est décédée, c'est le cas.

Est-ce que cela représente un pactole ?

Jean Loriot : Cela n'a rien à voir avec le catalogue de Johnny Hallyday ou d'autres artistes. La seule œuvre qui permet le versement de droits d'auteur important est La Planète des singes avec le cinéma. Le Pont de la rivière Kwai en génère très peu. 

Donc, quand il y a un film de la saga de La Planète des singes, vous percevez des droits ?

Jean Loriot : Oui.

Souvenirs d'enfance en Provence

Est-ce qu'il parle d'Avignon dans l'un de ses romans ?

Jean Loriot : Ce n'est pas Marcel Pagnol. Le seul ouvrage qui évoque Avignon, ce sont ses souvenirs d'enfance dans L'Ilon. C'est l'histoire d'une petite île située sur le Rhône. Une maisonnette appartenait à son père qui était avocat spécialisé dans la défense des braconniers. Il avait appris à son fils à connaître la nature et à reconnaître les animaux. Sa plus grande joie consistait à passer des nuits entières à écouter la nature.

Est-ce que ses romans vont être republiés ?

Jean Loriot : Je l'espère. Ses derniers mots ont été : j'espère que je ne serai pas trop oublié.