- Auteur Viviane Le Ray
- Temps de lecture 6 min
Les prix Médicis et Femina font de la résistance !
Le jury du Prix Médicis et le jury du Femina, « ont fait le pari que les amoureux d’une littérature exigeante feront le choix de leur libraire fusse par « réservation et retrait ». Comme me le dit un beau jour un certain Jean D’Ormesson : « Il est plus urgent de sauver les librairies, que les phoques ou les baleines … »
Prix littéraires 2020, remise des prix Médicis et Femina ...
En pleine saison de remise des Prix Littéraires, les plus importants de l’année, trois parmi les plus renommés : le Grand Prix du roman de l’Académie Française, Le Goncourt et Le Renaudot, ont fait le choix de les reporter « pour cause de pandémie », craignant, disons-le sans détours : une baisse du chiffre des ventes, face à la décision du Gouvernement (décision étrange au pays dit des Lumières !) de fermer les librairies de quartier chères aux vrais amateurs de littérature… au « profit » (c’est le mot juste !) des « supermarchés du livre » (le virus semble-t-il ne fréquenterait pas les grandes enseignes !)
Face à cette absurdité, le jury du Prix Médicis et le jury du Femina, « ont fait le pari que les amoureux d’une littérature exigeante feront le choix de leur libraire fusse par « réservation et retrait », comme l’a déclaré Marie Darrieusecq, Présidente du Fémina. Dans l’attente de la réouverture de ces temples de la culture que sont les librairies et leurs officiants passionnés, les libraires en majuscule, aujourd’hui en grand danger de mort… Comme me le dit un beau jour un certain Jean D’Ormesson : « Il est plus urgent de sauver les librairies, que les phoques ou les baleines… »
Les prix Médicis et Femina font de la résistance !
Remise du prix Médicis
« Médicis du roman » : Chloé Delaume
Chloé Delaume a remporté, le prix Médicis du roman français, pour « Le Coeur synthétique » : « Je n'osais pas y croire. Nous étions dix et il y avait des concurrents très, très sérieux", a affirmé la lauréate 2020, sur France Inter. « Le Coeur synthétique » paru au Seuil, raconte l'histoire d'une attachée de presse dans l'édition, divorcée sans enfant, qui à l'approche de ses 50 ans peine à trouver un sens à sa vie, et l’homme qui lui convienne… Le coeur de l’héroïne, Adélaïde, accepte la réalité, il sait se protéger. Il ne veut plus saigner, se préfère encore vide. « Le coeur d'Adélaïde se voudrait embaumé », écrit la romancière de 47 ans.
« Médicis du roman étranger » : l’écrivain espagnol Antonio Muñoz Molina
Le prix du roman étranger lui a été décerné pour « Un promeneur solitaire dans la foule » (également paru au Seuil). L’écrivain Espagnol (64 ans) avait publié en 2018 cette déambulation dans les métropoles où il a vécu, Madrid, Lisbonne, Paris et New York, et où il réfléchit à la beauté du monde, celui des artistes, mais aussi à sa laideur, le monde des capitalistes. « C'est une rêverie qui va nous permettre en ces temps de confinement de nous promener dans les villes et dans les rêves », a commenté Marie Darrieussecq.
« Médicis de l'essai » : Le Norvégien Karl Ove Knausgaard
Un prix décerné pour son ouvrage « Fin de combat », paru chez Denoël, il s’agit du sixième et dernier volet du cycle autobiographique de l’auteur : « Mon combat ». Cet ouvrage impressionnant (1 400 pages !) qui revient sur le début, en 2009, de la publication du grand oeuvre d'un auteur très controversé, qui devient subitement une « star », confronté à la colère de son père « C'est dans ce but, devenir riche, que, moi, j'avais exposé ma propre famille sur la place publique. Publier un tel livre était résolument inacceptable, parce qu'il était mensonger et qu'il portait atteinte au respect de la vie privée », se souvient Karl Ove Knausgaard, 52 ans aujourd’hui.
Remise du prix Femina
« Prix Femina » : Serge Joncour
Serge Joncour reçoit le « Fémina du roman français » pour Nature humaine, publié chez Flammarion. L’auteur nous conte près de trente ans d'histoire nationale où se répondent jusqu'au vertige les progrès, les luttes, la vie politique et les catastrophes qui ont jalonné la fin du XXe siècle, touchant de plein fouet une famille française. En offrant à notre monde contemporain la radiographie complexe de son enfance, l’écrivain nous instruit sur notre humanité en péril. À moins que la nature ne vienne reprendre certains de ses droits ! Né à Paris en 1961, Serge Joncour publie son premier roman en 1998, Il est l'auteur de douze romans dont « Repose-toi sur moi » (Prix Interallié, 2016)
« Prix Femina Essai » : Christophe Granger
Christophe Granger, maître de conférences à la Faculté des Sciences du Sport de l’Université Paris-Saclay, remporte le Femina 2020 dans la catégorie essai, pour son « Joseph Kabris ou les possibilités d'une vie », paru chez Anamosa. Une œuvre biographique qui, à travers l’étonnante histoire d’un homme né vers 1780 à Bordeaux, pose une question cruciale souvent laissée de côté : Au fond, comment se fait une vie? Cet essai est le fruit de recherches que mène l’auteur, sur le corps. Il est issu d’un ensemble plus vaste de textes rédigés dans le cadre de son Habilitation à diriger des recherches (soutenue le 25 septembre 2020).
« Prix Femina étranger » : Deborah Lévy
L'auteur a reçu ce prix pour son diptyque autobiographique, « Le Coût de la vie » et « Ce que je ne veux pas savoir », parus aux Editions du Sous-Sol : Un divorce douloureux, une grande maison victorienne troquée contre un appartement en haut d'une colline dans le nord de Londres, deux filles à élever et des factures qui s'accumulent. Deborah Levy a 50 ans quand elle décide de tout reconstruire, avec pour tout bagage, un vélo électrique et une plume d'écrivain. L'occasion pour elle de revenir sur le drame pourtant banal d'une femme qui s'est jetée à corps perdu dans la quête du foyer parfait…
Prix spécial du jury Femina : Charif Majdalani
Sous le feu de l’actualité ce prix spécial a été décerné à l’auteur libanais pour son « Journal d'un effondrement, Beyrouth 2020 », paru chez Actes Sud, en solidarité avec le Liban. Au début de l’été 2020, dans un Liban ruiné par la crise économique et l’inflation, dans un Beyrouth épuisé qui se soulève pour une vraie démocratie alors que le monde est pétrifié par le coronavirus, Charif Majdalani entame la rédaction d’un journal. Cette chronique de « l’étouffement et de l’effondrement », non dénuée d’une paradoxale légèreté, se trouve percutée le 4 août par l’explosion dans le port de 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium. Devenu témoignage du cataclysme, ce récit dresse le portrait d’une cité déjà pétrifiée par la violence de sa propre histoire, dont les habitants chancellent puis se redressent, jouets d’un destin aussi hasardeux que cruel. Né en 1960 à Beyrouth, où il vit, Charif Majdalani, est l’auteur de sept romans publiés aux éditions du Seuil.
Photo à la Une : issue de la jaquette "Fin de combat"de Karl Ove Knausgaard