- Auteur Danielle Dufour-Verna
- Temps de lecture 16 min
Marseille se raconte en musiques fictions : “14 histoires de musique(s) à Marseille”, présentées par Patrick Coulomb
Patrick Coulomb, écrivain, éditeur, journaliste, présente aux éditions Gaussen un recueil intitulé “14 histoires de musique(s) à Marseille “.
“C’est un recueil de nouvelles de fiction. J’ai demandé deux choses aux auteurs : que ça parle de musique et que ça se passe à Marseille.” Rencontre avec un auteur passionné …
Patrick Coulomb présente aux éditions Gaussen un fantastique nouveau recueil de fiction autour de la musique rock dans la ville de Marseille : "14 histoires de musique(s) à Marseille".
"Musicalement, Marseille est surtout réputée depuis deux décennies pour avoir donné au pays quelques-uns des acteurs les plus connus de la scène rap, d’IAM à Jul, en passant par Soprano. Ce n’est pourtant pas le rap qui bat la mesure de ce recueil. Comme d’autres musiques, le rap est là, mais la dominante ici est le rock. Présent dans à peu près la moitié des quatorze textes réunis, on en découvre les lieux secrets, les acteurs maudits, les atmosphères nocturnes. Car, oui, Marseille est une ville rock, très rock même, comme vous allez le (re) découvrir en lisant quelques-unes de ces nouvelles.
Mais, entre une évocation de la chanteuse du siècle dernier Gaby Deslys, un détour par le jazz, une course effrénée sur un rythme nord-africain, plus quelques scénarios mettant en avant la puissance de la musique sur les êtres, c’est un beat nouveau qui va vous emporter, une sensation d’apesanteur, entre musique et littérature. Laissez-vous guider sur les chemins par Calliope, la muse de la poésie épique, et bien sûr par Euterpe, celle de la musique."
Patrick Coulomb, journaliste et éditeur à Marseille
Rencontre avec Patrick Coulomb
Danielle Dufour-Verna - Projecteur TV : Bonjour Patrick, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Patrick Coulomb : Je suis journaliste à La Provence, d’une part, et d’autre part, depuis 20 ans, auteur, éditeur, et je participe à la réalisation de salons littéraires. En tant qu’auteur, j’ai publié des polars, des chroniques marseillaises, diverses choses, un livre de fantaisie également. En tant qu’éditeur, j’ai été pendant 13 ans avec François Thomazeau à la tête des éditions L'Écailler durant lesquels nous avons publié 150 bouquins, soit une dizaine de romans par ans, essentiellement des romans policiers, mais aussi des biographies, des enquêtes sur les voyous, des chroniques et quelques documents sur des affaires, notamment sur l’affaire Dominici. C’est un peu comme l’affaire du petit Grégory, ce sont des affaires qui ne « mourront » jamais. Avec le label, associatif, je travaille de diverses manières : D'une part en autoédition distribuée par des éditeurs en lignes internationaux (BOD, lulu.com etc.) via les plateformes internet de vente de livres (Fnac, Amazon, Cultura, Decitre… En réalité il y en a bien une centaine). Tout un chacun peut ainsi les commander, soit en version numérique soit en version papier (un vrai livre, pas de souci) imprimée à la demande. Les libraires peuvent aussi les commander de la sorte, si bien que tout un chacun peut aussi aller en librairie demander à ce qu'ils soient commandés. J'ai ainsi publié à ce jour trois polars de Sébastien Doubinsky ("Star", "Le feu au royaume" et "La théorie des dominos"), un récit historique de Bruno Leydet sur la peste de 1720 à Marseille ("Pestilence"), une sorte de polar que j'ai écrit ("Le chemin le plus court n'est pas la ligne droite") et un diptyque de "fantasy" que j'ai aussi écrit ("Vienne le temps des dragons"). Entre autres.
D'autre part avec des éditeurs "réels" en co-édition. A ce jour j'ai fait plusieurs recueils de nouvelles de cette manière avec les éditions Gaussen, à Marseille ("Marseille, an 3013", "Il était une fois dans la bibliothèque" et "14 histoires de musique(s) à Marseille"), et un avec les éditions Ramsay, à Paris ("Voyages immobiles en temps de confinement", dont les bénéfices reviennent à l'association Hope Project qui travaille à l'hôpital de La Timone pour améliorer l'accueil des enfants malades).
Enfin, je pense dans le courant de l'année trouver un distributeur, qui "placera" les livres dans quelques librairies. Dans cette optique, la première sortie prévue est un polar de Guillaume Chérel qui se passe sur l'île de la Réunion, "La femme qui mangeait des fleurs".
Danielle Dufour-Verna : Quel est votre domaine au niveau journalistique ?
Patrick Coulomb : Au niveau journalistique, je me suis occupé de spectacles et de culture pendant une quinzaine d’années. Aujourd’hui je suis dans un service qui s’appelle "les informations générales" et qui traite toute l’actualité nationale et internationale en termes de politique, de faits divers etc.
Danielle Dufour-Verna : Pas de regret pour ce changement journalistique ?
Patrick Coulomb : Si, je regrette forcément. J’ai beaucoup aimé travailler dans les spectacles, dans les concerts, dans le cinéma. C’était un vrai plaisir. Mais voilà, on évolue, on change, on nous fait changer aussi. On ne maitrise pas forcément le travail qu’on fait dans une rédaction où il y a 150 personnes, ça tourne un peu.
Danielle Dufour-Verna : Le livre "14 Histoires de Musique (s) à Marseille" est sorti il y a peu ?
"C’est un recueil de nouvelles de fiction. J’ai demandé deux choses aux auteurs : que ça parle de musique et que ça se passe à Marseille."
Patrick Coulomb : Il est sorti il y a quelques semaines. Il a un peu souffert du fait qu’on n’ait rien pu faire pour son lancement à cause de la COVID. Il y avait quatre ou cinq soirées prévues, des concerts, des tas de choses et finalement rien n’a pu se faire. Le bouquin est super intéressant. Ce n’est pas un bouquin sur l’histoire de la Musique à Marseille, c’est un recueil de nouvelles de fiction. J’ai demandé deux choses aux auteurs : que ça parle de musique et que ça se passe à Marseille. J’ai quatorze auteurs dans ce recueil qui sont, soit des musiciens capable d’écrire, soit des auteurs qui, d’une manière ou d’une autre, se sont intéressés à la musique. Il y a aussi deux journalistes de la Provence qui sont aussi musiciens : Laurent Alexandre qui est clavier dans un groupe de rock progressif et Nadia Tighidet qui est percussionniste dans un groupe qui s’appelait "Les Dames de la Joliette".
Danielle Dufour-Verna : Vous-même jouez d’un instrument ?
« Ça c’est mon tropisme à moi, on voulait faire toutes les musiques, mais en fait c’est du rock pour la moitié »
Patrick Coulomb : Je ne joue pas d’un instrument, par contre en ayant fait les concerts pendant dix, quinze ans pour le journal, j’aime beaucoup le rock and roll et je connais bien l’univers marseillais du rock et des concerts de manière plus générale. Je ne suis pas musicien, mais ça m’intéresse. C’est un univers qui me plait, où je me sens en phase. J’étais content de le faire aussi pour cela. Ça c’est mon tropisme à moi, on voulait faire toutes les musiques, mais en fait c’est du rock pour la moitié. J’ai donc séparé le bouquin en deux parties : une première partie qui n’est pas rock and roll et qui parle d’autres musiques. Il y a du jazz, de la musique Nord-Africaine… La deuxième partie est rock, et entre les deux un pont littéraire musical. C’est François Thomazeau qui a fait un truc à mourir de rire qui se passe pendant le premier confinement.
Danielle Dufour-Verna : Vous avez écrit l’une des nouvelles ?
Patrick Coulomb : C’est le 3e recueil de nouvelles que nous faisons avec David Gaussen sous un label que j’ai créé qui s’appelle "The Melmac Cat".
Danielle Dufour-Verna : Que veut dire Melmac ?
Patrick Coulomb : C’est une planète inventée dans une série télévisée qui s’appelait Alf. "The Melmac Cat" parce qu’il est, on va dire, indépendant de tout.
Danielle Dufour-Verna : Il y a beaucoup de fantaisie dans ce que vous faites…
Patrick Coulomb : Oui, beaucoup de fantaisie. Ce label se décline de plusieurs manières. Une de ces manières, avec les éditions Gaussen, nous avons monté une collection qui est essentiellement une collection de recueil de nouvelles. C’est le troisième. Le premier s’appelait "Marseille An 3013" avec des nouvelles de science-fiction, anticipation, futurologie qui parlaient de Marseille et ce à quoi cela pouvait ressembler dans mille, deux mille ans. Le deuxième s’appelait "Il était une fois dans la bibliothèque". Pas du tout Marseillais, pour le coup. C’étaient des nouvelles qui se passaient dans des bibliothèques. Et le troisième, c’est celui-ci, "14 histoires de musique(s) à Marseille".
Danielle Dufour-Verna : Marseille, c’est un peu le leitmotiv ?
Patrick Coulomb : Deux se passent à Marseille. En tant qu’éditeur, avec ce label toujours, j’ai fait des choses marseillaises et des choses non marseillaises. Par exemple, on a publié un livre de Bruno Leydet qui est un auteur marseillais. On a réédité un livre "Sortez vos morts" et on lui a redonné le titre qu’il voulait à l’origine : "Pestilence" qui parle de la grande peste de 1720 à Marseille, mais c’est une fiction, une enquête fiction. J’ai publié aussi un polar qui n’a strictement rien de marseillais par un auteur Sébastien Doubinsky, dont "La théorie des dominos". J’en ai publié trois en fait de cet auteur. Ce sont des polars qui se passent à Paris, à Londres, Atlantic City…
Danielle Dufour-Verna : Tout cela prend beaucoup de temps dans la vie d’un journaliste…
Patrick Coulomb : Ma vraie vie intellectuelle est celle d’éditeur et d’écrivain.
Danielle Dufour-Verna : La période COVID vous fait du mal par rapport à l’édition…
Patrick Coulomb : Oui, c’est grâce au COVID quelque part qu’on a fait avec Fanfan "Voyages immobiles en temps de confinement". C’est quand même une belle aventure. Pendant la première semaine du confinement, Delfino appelle Fanfan : « Il faudrait qu’on fasse quelque chose ». Fanfan m’appelle et me dit : "Jean-Paul m’a appelé, il faudrait qu’on fasse quelque chose" et à tous les trois on s’est mis à réfléchir, on a dit « On va faire ce qu’on sait faire ; on fait des bouquins, faisons des bouquins. » Nous avons appelé tous les auteurs qu’on pouvait connaître susceptibles de répondre présents. Grâce à Fanfan surtout, on a réussi à joindre 40 auteurs et pas de petits auteurs. On a du lourd dedans. On a monté ça à une vitesse incroyable. C’est-à-dire qu’en trois semaines, on a eu pratiquement tous les textes. J’ai fait faire la couverture par ma fille qui est dessinatrice.
Danielle Dufour-Verna : Une couverture géniale…
Patrick Coulomb : Une fois que nous avons eu les textes, j’ai dit à Fanfan : « Moi j’ai mon label, on peut le faire en vente directe sur internet en passant par les plates-formes Amazon, Fnac, Cultura etc. » On a quand-même réfléchi pour se donner un peu de temps. Voyons si on trouve un éditeur parce que ce serait mieux qu’il soit en librairie. On a pris nos téléphones et on a cherché un éditeur. En dix jours, j’ai trouvé un éditeur qui a dit "Banco" à savoir les éditions Ramsay. Trois semaines plus tard, le bouquin était à l’imprimerie. Il s’est passé à peine deux mois entre le jour où on a eu l’idée de faire ce bouquin et le jour où il est sorti de l’imprimeur. C’est en quelque sorte un exploit en termes d’édition. On n’était pas peu fiers de cela aussi.
Danielle Dufour-Verna : Les bénéfices de ce livre ont été versés à l’association Hope Project qui œuvre à l’Hôpital de la Timone, en particulier pour les enfants malades. Le professeur Raoult, dans le même établissement, a dû être ravi…
Patrick Coulomb : D’autant plus qu’il y a une nouvelle du grand écrivain Didier van Cauwelaert qui le défend bec et ongles.
Danielle Dufour-Verna : En tant qu’auteur, la COVID vous fait souffrir ?
Patrick Coulomb : Oui, on a souffert. Depuis l’été, tout est impossible. Il y a de petites dédicaces qui peuvent se faire en librairie depuis qu’elles ont rouvert mais en faisant très attention etc. mais il n’y a plus de salons du livre, de festivals… Il y a deux ou trois manifestations dont j’étais partie prenante soit comme organisateur, soit comme auteur, qui n’ont pas eu lieu. Je pense que tous les auteurs, quelque part, en souffrent même si, d’après ce qu’on entend dans les médias, le livre se porte plutôt bien, le monde vivant du livre, lui, il a "morflé", il a un genou à terre.
Danielle Dufour-Verna : Pensez-vous que la culture soit muselée en ce moment ?
Patrick Coulomb : De facto, la culture n’est pas muselée, elle est inexistante. C’est comme si on avait fermé le robinet. Je ne peux pas dire qu’elle soit muselée au sens politique. Je n’y vois pas l’intention de fermer le robinet au niveau culturel mais j’y vois le fait. Tout ce qui se fait dans l’existence vivante des gens, c’est-à-dire les concerts, le théâtre, le cinéma, les festivals, de danse, de courts-métrages…. Tout cela n’existe plus depuis le mois de septembre, octobre, depuis qu’ils ont décidé de fermer tout ça. Donc, de facto, la culture est muselée, d’accord. Je ne sais pas s’il faut y voir une intention mais les faits sont là et le problème est que si la culture reste encore fermée, ça va créer un enfer social pour tous les gens qui travaillent dans la culture, pour les artistes, oui, mais aussi et surtout pour tous les professionnels du spectacle : les organisateurs divers et variés, les techniciens divers et variés, les employés qui travaillent, qui vivent de la culture publique et surtout de la culture privée.
Danielle Dufour-Verna : Sans culture, en se jetant sur les émissions de TV tout public, n’y a-t’il pas un risque d’appauvrissement de la culture ?
« Il y aura un délire d’aller au cinéma, d’aller au théâtre, d’aller voir des concerts, qui va être démultiplié »
Patrick Coulomb : J’ai deux opinions opposées en quelque sorte. D’un côté, je me dis que oui, vous avez raison, on fait le lit d’un abaissement culturel parce que les gens prennent l’habitude de regarder Netflix et même sur Arte ou autre ou l’autre est un peu plus culturelle mais c’est la même chose, on reste sur son canapé, on ne sort pas. Oui, il peut y avoir d’autres habitudes qui sont en train d’être prises. Et au sortir de tout cela, ces habitudes vont rester prépondérantes. Tout ce qui est spectacle vivant, tout ce qui est culture vivante, risque d’en pâtir. D’un autre côté, je me dis aussi que, en fait, si je suis optimiste, c’est tout-à-fait l’inverse. C’est-à-dire que le sevrage pendant des mois va faire que, au sortir de cela, il y aura un délire d’aller au cinéma, d’aller au théâtre, d’aller voir des concerts, qui va être démultiplié. Dans tout cela, le livre n’est pas le moins bien loti. Les librairies ayant finalement rouvert, les gens peuvent continuer à aller acheter des bouquins ; ils peuvent en acheter aussi sur internet et je pense –je n’ai pas vu de sondage là-dessus - que la lecture y a gagné malgré tout, au passage. A partir du moment où on lit, même si on lit un mauvais roman à l’eau de rose, il y a toujours quelque chose à en tirer.
Danielle Dufour-Verna : N’avez-vous pas songé à Quartiers Nord pour une de vos nouvelles dans votre dernier recueil ?
« Dès que je fais un truc avec la fiesta, Rock sera le premier à qui je le demanderai. »
Patrick Coulomb : Quartiers Nord, on les avait publiés avec L'Écailler "2001, Odyssée de l’Estaque". Rock a sa propre maison d’édition, ses camarades ont leur maison d’édition, donc il publie avec eux. On avait démarré il y a trois, même quatre ans, la première mouture de "Histoires de Musique (s) à Marseille". C’est un truc qu’on devait faire à la Fiesta des Sud et Rock y était dedans. Je lui avais demandé d’écrire une nouvelle. Là je ne lui ai pas redemandé d’écrire une nouvelle parce qu’en fait je lui avais demandé pour la Fiesta des Sud et j’ai toujours le projet de faire un recueil avec la fiesta. J’en ai parlé à Robert de faire un recueil pour les 30 ans de la fiesta. Dès que je fais un truc avec la fiesta, Rock sera le premier à qui je le demanderai.
Danielle Dufour-Verna : Vous voulez ajouter quelque chose à cette interview ?
« J’ai plusieurs livres sur le feu »
Patrick Coulomb : Non, j’ai des tas de projets, mais ce n’est qu’à l’état de projet. J’ai plusieurs livres sur le feu et c’est difficile d’en parler pour le moment. Il y en a un qui doit sortir bientôt, celui-ci on peut en parler. Normalement dans le premier trimestre - je touche du bois - de cette année : un polar qui se passe à l’Ile de la Réunion, de Guillaume Chérel. J’ai plusieurs commandes d’une part, et deux livres personnels terminés dont j’attends éventuellement la sortie avec les réponses de certains éditeurs et un autre en cours.
Danielle Dufour-Verna : Ma dernière question, quelle est votre définition du bonheur ?
Patrick Coulomb : J’ai presque envie de vous répondre les paroles de la chanson d’Yves Simon qui dit « Être debout au coin d’une rue et n’attendre personne. »