- Auteur Danielle Dufour-Verna
- Temps de lecture 4 min
Michael Lonsdale, Un seigneur qui croyait au ciel…
L’immense acteur Michael Lonsdale a rejoint le ciel ce 21 septembre. Cet humaniste aux 60 ans d’une carrière prodigieuse a interprété tous les rôles de la “gamme des religieux”. Celui qui croyait si fort au ciel laisse orphelins ceux qui y croient et ceux qui n’y croient pas.
L’a t-il rejoint, ce ciel en lequel il croyait si fort ? Peut-être bien, peut-être… Nous restons là, démunis, orphelins d’une voix, d’une présence, d’un comédien dont l’humilité et la puissance ont franchi les murs de l’intime. L’immense Michael Lonsdale était, au cinéma et au théâtre comme dans la vie, intelligent, cultivé, sublime, généreux, fidèle. Il laisse derrière lui, avec plus de peine encore, ceux qui n’y croyaient pas... Son ami, Richard Martin, comédien, Directeur du Théâtre Toursky International à Marseille, est de ceux-là.
Celui qui n’y croyait pas…
En Mars 2017, deux hommes se retrouvent pour la représentation d’une création qu’ils avaient donnée au théâtre Toursky en 2011 : Celui qui croyait au ciel, celui qui n’y croyait pas, un combat fraternel construit à partir de la parole de poètes : Victor Hugo, Verlaine, Marguerite Duras, Saint-John Perse et des psaumes d’un côté ; Rimbaud, Baudelaire, Prévert, Brassens, Ferré et Boris Vian de l’autre. Ces deux-là se connaissaient bien, s’estimaient, se comprenaient. Complices, ils s’aimaient, car l’un et l’autre défendaient un même dieu : l’humanité. Je revois l’immense Michael Lonsdale, son sourire, le regard clair qu’il savait rendre profond ou malicieux, sa stature imposante, les épaules légèrement voûtées, sa voix grave, unique, inoubliable, son charisme.
À l’issue de ce spectacle, Richard Martin avait confié :
« Il est important pour l’humanité, dans un monde terrifié qui a peur, d’entendre la voix des poètes, la formulation poétique de l’espoir. Alors que la barbarie gonfle, nous appelons, Michaël et moi, les poètes avec qui nous avons compagnonné depuis le début de nos exercices, pour partager avec le public des réflexions qui vont vers la fraternité. Ensemble les hommes de bonne volonté, qu’ils soient croyants ou non, peuvent avancer dans un même élan et, à condition de laisser place aux idées de chacun, construire un présent et un avenir commun » Des paroles qui résonnent aujourd’hui avec plus d’acuité encore.
« Le poète place son texte hors du temps, au seuil de l’éternité ». On retient sa respiration pour laisser passer le souffle de la poésie et de la fraternité. Quand les poètes nous saluent, on ressort heureux, un peu orphelins de cet aura palpable, mais avec au cœur l’espoir de « lendemains qui chantent. » avait dit Richard Martin.
Michael Lonsdale nous a salués en ce mois de septembre 2020, à l’âge de 89 ans, à la manière des poètes. Où qu’il soit, que le zéphyr lui soit doux.
Michael Lonsdale, 60 années d’une carrière prodigieuse
Michael Lonsdale a joué pour un nombre impressionnant de réalisateurs: François Truffaut dans La Mariée était en noir et Baisers volés, Orson Welles pour Le Procès, Louis Malle pour Le souffle au cœur, Luis Buñuel pour Le Fantôme de la liberté ou Jean-Pierre Mocky, Marguerite Duras au cinéma, notamment pour le long-métrage India Song, dans lequel il jouait le vice-consul de Lahorex, jusqu’au onzième opus de la saga James Bond 007 où donnait la réplique à Roger Moore, le Munich de Steven Spielberg, Des hommes et des dieux, de Xavier Beauvois où il jouait le frère Luc, l’un des sept moines de Tibhirine, en Algérie, assassiné en 1996, événement qui avait frappé l’opinion internationale. Sa performance lui avait valu le César du meilleur acteur dans un second rôle. La dernière fois qu’il était apparu à l’écran était pour le documentaire Le fantôme de Laurent Terzieff, dans lequel il témoignait sur une autre légende du théâtre et du cinéma français, dont il avait rejoint la troupe assez tôt dans sa carrière. Sorti le 9 septembre dernier, il est toujours dans les salles.
Michael Lonsdale, né le 24 mai 1931 d’une mère française et d’un père anglais, a passé son enfance entre la France, l’Angleterre et le Maroc. Il aimait le soleil, il aimait la Provence. C’est en Provençal, alors qu’après la pluie un magnifique arc-en-ciel est apparu, et pour lui rendre hommage, que nous le saluons : Adessias Michael (que Dieu soit avec toi) !