- Auteur Danielle Dufour-Verna
- Temps de lecture 7 min
‘The Road to Freedom’ – Éclatant retour de Barbara Hendricks au son du blues
En concert à Vaison-la-Romaine le 21 août, sa voix magnifique a jailli dans le Théâtre antique sur ce ‘Chemin vers la Liberté’ avec une intensité, une passion nouvelle, une foi tenace en l’humanité, emportant le cœur et l’âme d’un public totalement conquis.
Barbara Hendricks était en concert au théâtre antique de Vaison-la-Romaine, le 21 août 2022, pour partager avec le public son nouvel album "The Road to Freedom". Lors du concert avec son Blues Band, la cantatrice a cité des extraits de discours de Martin Luther King, ainsi que le poème « Home » de Warsaw Shire lors de son Medley pour les enfants réfugiés.
"The Road to Freedom", le chemin vers la liberté de Barbara Hendricks
Biographie courte
Née dans le sud des Etats-Unis au temps de la ségrégation qui ne permettaient pas aux Noirs d’aller dans les mêmes écoles, les mêmes bus, les mêmes restaurants que les Blancs, Barbara Hendricks est fille d’un pasteur et d’une mère institutrice. Ses premiers chants furent les negro spirituals, la musique des esclaves. Personnalité très engagée, Barbara Hendricks a été nommée en 1987 ambassadrice itinérante du Haut-Commissariat des Nations Unis pour les réfugiés. Ambassadrice à vie de l’UNHCR, sa ‘Fondation Barbara Hendricks’ pour la Paix et la réconciliation soutient son combat pour la prévention des conflits dans le monde, facilite la réconciliation et le renforcement de la paix dans les zones de conflits.
Artiste engagée, entourée de ses trois splendides musiciens, Barbara Hendricks cite des extraits de discours de Martin Luther King durant sa prestation et récite également le poème « Home » de Warsaw Shire lors de son Medley pour les enfants réfugiés. Un concert transcendant, émouvant, qui s’inscrit dans son nouveau projet « The Road to Freedom » (“Le Chemin vers la Liberté “). La chanteuse lyrique met désormais sa voix, reconnaissable entre toutes, au service du blues, rendant ce répertoire fascinant et envoutant.
La nouvelle Barbara Hendricks, c’est une voix mélodieuse, magnifique, au service de l’amour et de la paix.
Nouvel album pour un retour aux sources
Danielle Dufour Verna/Projecteur tv - Ce nouvel album est-il un retour aux sources ?
Des influences de Martin Luther King ...
Barbara Hendricks – Oui. Il a quelques années, mon agent en Espagne m’avait demandé si je pouvais faire un programme pour un festival de Gospel. C’était effectivement ce que je connaissais le mieux et que je chantais à l’église, a capella, quand on chante en chœur la musique des esclaves. En essayant de faire le programme, j’ai réalisé que la plupart des choses que j’avais choisies faisait partie de la musique qui accompagnait la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis, menée par Martin Luther King. Quand j’ai chanté le concert pour la première fois, j’ai ajouté quelques citations de Martin Luther King dans le programme pour faire comprendre l’atmosphère de cette lutte, de ces manifestations aux Etats-Unis dans les années 50, 60. Le programme du concert a continué à évoluer pour devenir le ‘Road to Freedom’ que je fais aujourd’hui. J’ai réalisé qu’on a autant besoin aujourd’hui qu’il y a 60 ans de ce message de solidarité, d’amour qui est à la fondation de ce mouvement contre la ségrégation et l’apartheid.
DDV – Y a-t-il un titre, dans cet album, qui vous tienne à cœur, plus qu’un autre ?
Barbara Hendricks - Non, pas vraiment parce que je suis totalement présente dans celui que je chante sur le moment. Bien sûr, il y a des titres qui évoquent des souvenirs de mon enfance, l’église de mon père… Je crois que la force vient du message et de la musique, ensemble ; on voit la situation invraisemblable qu’il y a en Ukraine, des guerres, des conflits dans le monde qui ont moins peut-être moins d’attention auprès des médias mais la souffrance est la même. C’est plus qu’un concert, c’est donner quelque chose de façon à ce que le public puisse partir avec le petit grain de l’espoir, cette idée que nous sommes ici ensemble sur cette terre comme frères et sœurs. A la maison, au bureau, dans la rue où l’on habite, dans son appartement, il faut vivre cette idée que nous sommes ensemble parce que c’est la seule chose qui va nous sauver.
DDV - Que pensez-vous de la situation actuelle des femmes aux Etats-Unis ? Pensez-vous que d’autres pays puissent engager des réformes qui écrasent la femme ?
"« Si on ne peut pas courir, il faut marcher. Si on ne peut pas marcher, il faut ramper, mais quoi que l’on fasse, il faut continuer à avancer. » Citation de Martin Luther King
Barbara Hendricks – La situation des Etats-Unis est dramatique. Mais en Amérique du Sud, les femmes avancent alors qu’on pensait que cela ne se ferait jamais à cause de l’église. Ce qui se passe aux Etats-Unis est un regard en arrière alors que d’autres pays en Amérique du Sud vont de l’avant. C’est une indication, cette attaque aux femmes. C’est une façon de mettre la femme à sa place parce qu’ils ne parlent pas seulement de l’avortement, ils parlent aussi de la contraception, ils parlent de la santé des femmes. C’est un homme qui doit décider, c’est inacceptable. Ils regrettent le temps où la femme était obligée de rester à la maison, faire des enfants, où elles acceptaient de subir toutes les volontés de l’homme. C’est terminé, on ne va pas en arrière ! Il y a toujours des reculs, mais en général, les femmes avancent. C’est pour cela qu’il faut se battre. Martin Luther King a dit : « Si on ne peut pas courir, il faut marcher. Si on ne peut pas marcher, il faut ramper, mais quoi que l’on fasse, il faut continuer à avancer. » Nous, les femmes, nous sommes armées. Si on avance, c’est parce qu’il n’y a pas une femme seulement, nous sommes des millions. Sans les femmes, même quand nous étions à la maison, Martin Luther King n’aurait jamais réussi les choses qu’il a écrites. Sans les femmes en Afrique, ce serait terminé. Ce sont les femmes qui font avancer…
À 73 ans, Barbara Hendricks en tournée marathon !
DDV - Une voix merveilleuse, belle, en tournée marathon malgré vos 73 printemps, quel est votre secret Barbara Hendricks, l’amour ?
Barbara Hendricks – Oui, exactement, oui, c’est l’amour, l’amour des gens, de mes proches, de mes frères, mes sœurs dans le monde. Cela ne veut pas dire que je vais prendre tout le monde chez moi, mais j’ai ce sentiment que j’appartiens à cette famille, l’humanité.
DDV - Connaissez-vous Vaison-la-Romaine ?
Barbara Hendricks – Oui, bien sûr. J’avais fait un concert il y a quelques années à Orange, aux Chorégies.
DDV –Vous qui chantez le Gospel, avez-vous cette foi que les chants déclament ?
Barbara Hendricks – Je crois en quelque chose qui est plus grand que moi. Comme je l’ai dit, je crois en cette humanité. J’ai la chance d’habiter la campagne et près de la mer. Quand je regarde à la fenêtre, je vois les arbres, l’eau, l’écureuil, je crois en la nature. Je crois en cette création extraordinaire. Oui, je crois en quelque chose de plus grand que moi, la création. De la religion, car mon père était pasteur, j’ai appris certaines choses pour vivre avec les autres mais j’ai également appris la responsabilité d’être humain.
DDV- Cette tournée, ce concert, c’est un retour magnifique…
Barbara Hendricks – Oui, il y a huit ans que je suis à la retraite (rires). C’est un peu le dessert. Ces messages, ce programme, ce concert, c’est l’univers qui m’a demandé de le faire. Je continue de faire cela parce que j’aime chanter, j’aime partager les émotions avec mon public. Et j’ai la chance d’avoir un public qui vient voir quelqu’un qu’ils ont l’impression de connaître, un peu comme la gentille tante de la famille. Ce n’est pas de l’adoration, c’est de l’affection et c’est très chaleureux. Je continue parce que cela me fait plaisir. Mon devoir est de laisser quelque chose derrière moi.
DDV – Quelque chose à ajouter à cette interview ?
Barbara Hendricks – Oui, je suis ravie de venir à Vaison à la rencontre de ce public formidable. J’espère donner de l’espoir et nous inciter, toutes, à continuer à lutter. On va lutter pour nos enfants, garçons et filles, pour nos familles, pour les hommes, parce que si les femmes sont libres, les hommes sont libres aussi. Ce n’est pas femmes contre hommes, mais nous, les femmes, sommes les moteurs.
DDV – Ma dernière demande, quelle est votre propre conception du bonheur ?
Barbara Hendricks – De pouvoir aimer et être aimée…